L’économie collaborative compte aujourd’hui plusieurs millions d’habitués en France et enregistre annuellement de fortes croissances. Par exemple, la plateforme Leboncoin compte 5 millions de visiteurs par jour, Airbnb 150.000 annonces en France, et BlaBlaCar 8 millions de membres.
Ce succès a poussé plusieurs pays européens à réfléchir à taxer ces plateformes en adaptant l’impôt sur le revenu à cette nouvelle manière de gagner de l’argent. L’impact se fera sentir essentiellement sur les prix et sur les profits. L’équation serait donc de savoir comment taxer l’activité d’une manière juste sans décourager l’élan d’innovation propre à cette économie.
Toutefois, la taxation de ceux qui offrent le service pourrait avoir des effets secondaires à influence combinée difficile à apprécier : Un effet de contamination pour la plateforme, un effet de ricochet pour les particuliers et un effet double tranchant pour la concurrence.
Un effet de contamination pour la plateforme
Le modèle de l’économie collaborative est basé sur ce que l’on appelle un développement croisé entre groupes. La participation du groupe de ceux qui offrent les services renforce celle du groupe qui consomme les services proposés. Quand une plateforme donne gratuitement l’accès au groupe qui propose des services, elle perd théoriquement de l’argent spécifiquement sur ce groupe, mais en gagne automatiquement pour le groupe des utilisateurs.
Donc si le prix de l’accès est amené à devenir payant ou à augmenter à cause de la taxation de la vente pour les offreurs de services, certains vont probablement quitter la plateforme entrainant avec eux certains utilisateurs. Ceci se traduira par une baisse de l’offre qui entrainera forcément moins d’utilisateurs.
Un effet de ricochet pour les particuliers
Deux modèles de déclaration des revenus des particuliers sont possibles. Soit le système de taxation à la source, c’est-à-dire directement sur les plateformes, soit un système de collecte d’informations relatives aux vendeurs à transmettre à un fichier central de l’administration fiscale. L’un et l’autre systèmes engendrent un fardeau fiscal à supporter par ceux qui réalisent des revenus (d’une manière habituelle). Or, pour réguler la perte de clients utilisateurs due à l’effet de contamination, la plateforme a recours à la baisse du prix d’accès qui leur est appliqué.
Sachant que toute variation à la baisse du prix côté utilisateurs du service conduit la plateforme à revoir les prix pratiqués du côté des offreurs de services, il est possible que la plateforme décide au final de ne pas augmenter le prix pour les offreurs de services voir le diminuer et au contraire augmenter celui des utilisateurs uniquement car il est moins profitable à diminuer.
Le résultat sera probablement qu’une taxe censée être supportée par un groupe et finisse ensuite par être entièrement supportée par l’autre, d’où l’effet de ricochet.
Effet à double tranchant pour la concurrence
En augmentant les prix d’une plateforme leader sur le marché, les concurrents vont à priori réagir en adaptant les leurs vers la hausse. Il est dans ces cas possible que la taxation soit stratégiquement plus favorable à la plateforme initialement taxée que l’effet négatif de la taxe qui lui a été imposée. En effet, la hausse des prix suite à la taxation rendrait possible une concurrence moins agressive avec une croissance des profits pour toutes les plateformes. En revanche, si les plateformes concurrentes diminuent stratégiquement leurs prix ou n’appliquent pas la taxation imposée, la plateforme initialement taxée en souffrira doublement, à travers la taxe elle-même et à travers la perte de parts de marché.
Des études estiment le chiffre d’affaires mondial de l’économie collaborative à horizon 2025 à 235 milliards $. En 2014, 70 % des français, soit près de 31 millions de personnes, ont eu recours à l’économie collaborative.
L’imposition de ces revenus répond dès lors au principe de l’égalité fiscale tout en rattrapant un manque à gagner pour les caisses de l’Etat. Toute la problématique réside dans l’art de préserver et d’encourager une économie émergente totalement profitable à l’économie nationale sans faillir aux principes généraux du droit.
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