Pourquoi Westeros est-il embourbé dans 8 000 ans de stagnation économique? Daenerys devrait-il lancer le King’s Landing pour empêcher une guerre plus longue? Le monde de Game of Thrones (GoT) fourmille d’interactions fascinantes entre les institutions et le pouvoir qui créent une méga-saga géopolitique qui ne demande qu’à être théorisée. Un examen de ces questions sous l’angle de l’économie, du droit, des relations internationales et des politiques de pouvoir promet d’être à la fois instructif et divertissant. Dans les lignes qui suivent, nous allons voir pourquoi Game Of Thrones est plus qu’une série fantastique.
Une série qui décrit admirablement les turbulences politiques actuelles
Il y a toutes sortes de façons dont Game of Thrones pourrait être utilisé pour caricaturer la situation géopolitique du 21ème siècle. Pendant les manifestations anti-gouvernementales turques sur la place Taksim en 2013, le slogan familier des Trônes «L’hiver arrive» pouvait être vu sur les murs; plaisanterie, certes, mais pointant aussi vers un avenir politique incertain qui trouve son écho le plus retentissant à Westeros. Ce même slogan est souvent compris comme une façon inversée d’imaginer la catastrophe environnementale à venir. De même, les tensions religieuses à Westeros, entre les monothéismes militants puritains et un polythéisme décadent, mettent en scène une sorte de commentaire ironique sur la rhétorique d’un choc des civilisations.
Des références historiques parfaites
En effet, comme avec tout grand drame, les symboles et les histoires de Games of Thrones sont remarquablement portables, prenant de nouvelles résonances dans différents contextes et refusant d’être limitées à une seule lecture. Cela le distingue des piliers du genre fantastique comme le travail de JRR Tolkien, sans parler des adaptations cinématographiques stupéfiantes de Peter Jackson. Là où ces écrivains présentent la certitude morale d’une version mielleuse d’un monde qu’il faut défendre contre les hordes barbares, il est plus difficile de comprendre pourquoi les Sept Royaumes de Westeros demandent la protection des White Walkers, des géants et des wildlings qui vivent au nord du Mur, une falaise de glace, haute de 700 pieds.
Le Mur peut être vu comme le bord d’une juridiction légale, une ligne qui sépare la règle de droit de l’anarchie, et, la civilisation de la barbarie. À de nombreux moments de la série, il rappelle de véritables murs historiques comme ceux de Berlin, Jérusalem et le mur d’Hadrien, bien que les associations soient une provocation à la pensée et non des allégories qui donnent la clé du sens. A Westeros comme à Berlin, le mur n’est pas une exception, c’est la règle.
Une description parfaite des problèmes sociaux du 21ème siècle
La vision de GoT d’une société régie par des règles permet également un examen de la façon dont les genres interagissent. Sansa Stark, une jeune noble, commence la série sous le charme d’une version fantastique et idéalisée de l’amour courtois, basée sur des normes chevaleresques rigides. Mais ses attentes romantiques sont frustrées, car elle est fiancée pour des raisons politiques à une série de sociopathes. Les spectateurs des récents épisodes commencent à voir des signes de la conscience de soi en ce qui concerne les limites imposées par la société.
Games of Thrones abonde en personnages, qui de diverses manières ne répondent pas aux descriptions normatives de leurs genres respectifs. Comme l’explique Jaime Hovey, le travestissement de Brienne de Tarth en une sorte de chevalier mâle confirme les rôles de genre classiques. C’est comme si elle avait simplement changé de camp et cela démontre la difficulté de refuser son sexe dans une société régie par des règles rigides. Le fait d’être né mâle ne garantit cependant pas une promenade facile à Westeros.
Il est trop tôt pour dire si Game of Thrones apparaîtra dans les programmes universitaires pour les décennies à venir, ou s’il parlera des mœurs sociales et politiques de 2040 comme il le fait maintenant. Pourtant, il ne me semble pas tout à fait improbable que lorsque les habitants de Kepler 22b se relèveront dans 600 ans, ils se reconnaîtront dans cette série.
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